« Ca vous fait quoi d’entrer dans un musée à l’âge de 26 ans ? » « Alors, dit comme ça, c’est un peu glauque !. » Comme à son habitude, Antoine Dupont entre par une petite pirouette humoristique dans sa réponse à une question solennelle. A un petit mètre de lui, Frédéric Michalak caresse ses cheveux. Enfin, plutôt celui du double du capitaine du XV de France, meilleur joueur du monde en 2021, et depuis mercredi soir statufiés au musée Grévin aux côtés de son idole de jeunesse et ancien ouvreur des Bleus.
Les deux hommes, figures du Stade toulousain à vingt ans d’intervalle, ont intégré la galerie des représentations de cire de l’institution parisienne, devenant les quatrième et cinquième représentants de leur sport à y être conviés, les premiers depuis Sébastien Chabal en février 2011. Le signe d’une attractivité et d’un glamour retrouvés pour le rugby français dans une année qu’il espère historique avec l’ambition de remporter la première Coupe du monde de son histoire cet automne à domicile.
« Quand on me l’a proposé, j’ai trouvé ça étrange, avoue sans détour le demi de mêlée et meneur de cette génération vainqueur du Grand Chelem 2022. Il a depuis eu le temps de méditer de la pertinence ou non de sa sélection par l’Académie Grévin, au gré d’une première séance de mesures en novembre en compagnie de celui dont il portait le maillot tricolore gamin puis d’ajustements pour le modelage à Marcoussis lors du dernier Tournoi des Six Nations sous l’oeil amusé de certains partenaires.
« C’est bien fait »
Avant finalement cette cérémonie de cette fin de mois de mai, animée par un Gérard Holtz tantôt ému – « Honorer des champions de votre niveau, c’est un truc qui touche le coeur », tantôt à retracer l’histoire du rugby, tantôt l’histoire tout court en invoquant « Jeanne d’Arc, Fachoda et Mers El Kébir » au moment d’évoquer l’historique succès de « Toto » et des Bleus en Angleterre (10-53) en mars. Une petite heure d’introduction, en présence d’Oli, proche de Dupont et venu sans son frère Bigflodes familles des intéressés et aussi de personnalités du rugby comme Cyril Baille, Julien Marchand ou Yannick Nyanga, avant d’enfin voir débouler les statues de cire sur scène sous les notes synthétiques de « Freed from Desire » de Gala.
« C’est super bizarre, franchement, lâche d’emblée Michalak, le futur entraîneur de l’attaque du Racing 92. Voir son double, c’est troublant. » Sa statue devait être en tenue de rugbyman, mais l’ex-ouvreur a jugé plus pertinent d’apparaître au public de Grévin comme le technicien qu’il est devenu. Le clone cireux de Dupont arbore lui le maillot des Bleus et un ballon dans les mains. « C’est bien fait, même si j’ai du mal à dire parce que je ne me vois pas par définition », poursuit le Toulousain.
Les deux hommes enchaînent les questions-réponses, tissant en toile de fond ce respect mutuel qu’ils se portent sans jamais avoir joué ensemble. L’échange dérive sur le Mondial à venir, pour le plus grand agacement des représentants du musée Grévin. Les deux hommes font le job, Michalak parle d’une génération « qui sait mieux gérer ce qu’il y a autour » que la sienne de 2007, terrassée en demi-finale par l’Angleterre. Avant de se muer en protecteur en mettant un terme à la zone mixte quand un journaliste questionne Dupont sur ses ambitions de disputer les Jeux olympiques 2024 au rugby à sept.
C’est l’heure pour le duo d’aller retrouver leurs proches, qui ont déjà filé à la réception pour fêter l’événement. Leurs deux statues elles, vont aller rejoindre les autres sportifs du musée Grévin, comme le judoka Teddy Riner et Clarisse Agbégnénou, les footballeurs Kylian Mbappé et Antoine Griezmann ou encore l’ex-biathlète Martin Fourcade. Que des champions du monde. Un statut dont rêve Antoine Dupont. Bien plus que de se voir figé parmi les autres icones du musée Grévin.