Est-ce quand il tourne « Rocco et ses frères » au crépuscule des années 1960 qu’Alain Delonalors âgé de 25 ans et qui joue le rôle d’un boxeur de quartier, prend goût au sport ? Ce n’est pas improbable, vu la rigueur du métier d’acteur que le jeune premier du cinéma français s’imposait alors.
Dix ans plus tard, Alain Delon a gagné en notoriété, en popularité aussi. Acteur le plus doué de sa génération avec Jean-Paul Belmondoil s’affiche avec ce dernier dans « Borsalino » en 1970, avant de s’ouvrir au monde du sport, lui qui déclarait ne pas avoir le temps d’en faire dans sa vie quotidienne, bourreau de travail qu’il était.
C’est alors qu’en 1972, il crée une association avec Pierre-Désiré Allaireune des figures du trot français, une nouvelle passion de Delon. Dans un reportage pour le journal télévisé, l’acteur se rend avec son hélicoptère personnel dans le haras d’Allaire, dans l’Orne. Devant la caméra, il explique d’où lui vient cet attrait pour le trot.
Du cheval à la boxe
« J’ai eu l’occasion de driver (monter, ndlr) dans le Midi avec des amis. Et le goût, d’abord, m’a pris. Et maintenant la passion du trot, des trotteurs. Ce qui me fascine et qui me plaît dans le trot, c’est qu’il y a, entre l’homme et le cheval, un contact qui n’existe pas, à mon sens au galop. C’est-à-dire qu’il y a des rapports avec le cheval. Vous pouvez le driver, aller le voir dans son box, partager sa vie », narre celui qui avait également investi dans le galop.
Mais à la même période, le plus gros investissement d’Alain Delon dans le sport n’a pas encore eu lieu. Il apparaîtra un an plus tard, lorsque dans sa propriété de Douchy (Loiret), là où il a terminé sa vie jusqu’à ce dimanche d’août 2024il fait venir le boxeur Jean-Claude Bouttierchampion d’Europe des poids moyens en 1971. Vaincu il y a un an par le champion du monde argentin Carlos Monzón à Colombes, Bouttier doit prendre sa revanche, et pas n’importe où. Elle se fera au stade Roland-Garros.
Mais des difficultés de financement compromettent la tenue du combat. Alors, Alain Delon, qui avait repéré Bouttier, se charge de le financer. De plus, il convie le boxeur à s’installer à Douchy pour préparer sa revanche contre Monzón. « Jean-Claude est un ami de longue date d’une part. D’autre part, il était important de créer un climat, une atmosphère de tranquillité et de bien-être », explique-t-il à l’ORTF un mois avant le combat depuis sa propriété.
« Cette revanche contre Monzón, a été mise en place grâce à Alain Delon. Il avait en face de lui un petit gars, moi, qui a été apprenti boucher. Lui a été apprenti charcutier. Il avait beaucoup d’estime, beaucoup de respect », expliqua plus tard Bouttier.
« Bouttier faisait l’admiration de tous, nous confiait en 2021 Franck Weus, président du Roc Boxe de Royan et présent au combat. C’était un gars comme nous, courageux, simple. On l’a oublié, mais il était une star à cette époque-là. Peut-être bien la seule du sport français, car on n’avait pas de footballeurs à côté. Il était face à Monzón, un grand boxeur, mais chiant à affronter car il reculait tout le temps. Il frappait en reculant, ce qui était une performance. »
Pionnier aux 24 heures du Mans
Et bien que Jean-Claude Bouttier ait été vaincu aux points devant 15 000 personnes dans l’antre du tennis parisien, Alain Delon n’en est pas moins dégoûté du sport. Après les chevaux et la boxe, il se passionne pour les courses automobiles. En 1980, il assiste, depuis les coulisses du circuit, aux 24 heures du Mans. À son arrivée, sous la pluie, il est aperçu aux côtés de Mireille Darcavec qui il partage sa vie depuis douze ans.
En 1996, toujours au Mans, Alain Delon instaure une tradition. Il devient la première célébrité à donner le départ de la course mythique en agitant le drapeau. Plus tôt, en 1990, il se rend à Suzuka pour le Grand Prix de Formule 1 du Japon. Là, il est photographié aux côtés d’Alain Prost qui se trouve alors dans sa seule saison chez Ferrari de sa carrière. Son « ami », témoigne alors Delon.
« Il avait une passion pour les grands champions »
« Il aimait l’automobile en général, confie Paul Belmondo, dont le père Jean-Paul était très proche d’Alain Delon. Il n’y avait pas que le sport automobile parce qu’il avait de très belles voitures. Il avait une passion pour les grands champions aussi. En fait, je pense qu’il était plus attiré par l’homme. J’ai le souvenir d’un Vivement dimanche avec Schumacher et je crois qu’il était passionné par les sportifs, comme il était passionné par Monzón pour la boxe », précise celui qui a couru en Formule 1 dans les années 1990.