La vie de cette mère de famille thaïlandaise n’a, au premier regard, rien d’anormal. Issue de la banlieue de la capitale BangkokSararat Rangsiwuthaporn est divorcée d’un policier de haut rang, avec lequel elle avait eu deux enfants. Diplômée en relations publiques de l’Université Nakhon Pathom Rajabhat, à l’ouest de Bangkok, ces conférenciers ne disent aucun mal d’elle à la fin de ses études en 2009. 14 ans plus tard, la femme de 36 ans est accusée d’être, avec 14 meurtres à son actif, la pire tueuse en série de l’histoire de la Thaïlande.
En réalité, la mère de famille souffre de graves problèmes d’argent en raison notamment d’une addiction aux jeux d’argent en ligneet de très faibles revenus. Alors pour cela, Sararat Rangsiwuthaporn, surnommée « Aem », emprunte de l’argent à des proches, des « nouveaux amis » qu’elle connaît à peine comme l’indiquent les rapports de la police locale.
« Et si ces personnes lui demandent de rembourser l’argent, elle les tue », résume simplement le chef adjoint de la police nationale, Surachate Hakparn, en conférence de presse.
« Une affaire historique en Thaïlande »
La femme de 36 ans répète à chaque fois le même mode d’action : un empoisonnement au cyanure, d’où son surnom donné dans tout le pays, « Aem cyanure ». À chaque fois, la tueuse en série finit par réussir à faire ingérer par voie orale à ces victimes ledit poison soit en mangeant, soit en leur faisant croire qu’il s’agit d’une pilule amaigrissante.
Résultats : entre 2015 et 2023, dans huit provinces autour de Bangkok, Sararat Rangsiwuthaporn arnaque 140 000 euros à 15 personnes. Une seule a survécu. Une femme qui raconte avoir prêté 250 000 bahts (environ 6500 euros) à l’accusée. Au moment de récupérer son dû, elle avait déjeuné avec « Aem », avant de vomir et de s’évanouir.
Un périple meurtrier presque familial. En plus de la sœur de la tueuse, pharmacienne, qui lui fournissait le cyanure, Vitoon Rangsiwuthaporn, son ex-mari policierest également accusé d’avoir couvert un des crimes. La tueuse avait fait subir le même sort à son ex-petit ami, à qui elle devait un peu moins de 2000 euros, à cause d’un plan d’épargne,
« C’est une affaire historique en Thaïlande. Même Jack l’Éventreur, au Royaume-Unin’a pas tué autant de personnes (…) Le pays a déjà connu des tueurs en série, mais jamais avec autant de morts », a rappelé le chef adjoint de la police, Surachate Hakparn.
Enceinte au moment de son interpellation
Pour élucider l’affaire et retrouver les traces de la meurtrière, les enquêteurs thaïlandais ont interrogé plus de 900 témoins et examiné 25 000 documents. L’affaire a commencé lorsque la Thaïlandaise a été soupçonnée d’avoir assassiné une amie dans la province de Ratchaburi, à l’ouest de Bangkok, au mois d’avril. Après avoir interrogé Sararat Rangsiwuthaporn, les enquêteurs ont fait le rapprochement avec d’autres cas d’empoisonnement au cyanure dans les provinces de Kanchanaburi (ouest) et de Nakhon Pathom, près de la capitale, remontant pour certains à huit ans.
Au total, la mère de famille fait l’objet d’environ 80 chefs d’inculpation, dont 14 pour meurtre avec préméditation, ce qui constitue un record dans l’histoire de la criminalité thaïlandaise, selon la police. Diagnostiquée comme souffrant de problèmes psychiatriques, la trentenaire, qui encourt la peine de mort, a plaidé non-coupable.
En plus d’être la pire affaire criminelle du royaume, le procès fait aussi l’objet de critiques sur le comportement des policiers et des gardiens à son encontre. Enceinte de quatre mois au moment de son interpellation fin avril, Sararat Rangsiwuthaporn a fait une fausse couche en prison et a été envoyée à l’hôpital. Accusée d’interrogatoires musclés, la police a, elle aussi, plaidé non coupable.