18 h 55. Les yeux rougis de bonheur, le visage fracassé par l’effort, Valentin Madouas prend quelques minutes pour répondre aux journalistes français. La Marseillaise est passée, la médaille d’argent brille autour de son cou. Il y a une heure et demie, le Breton et son pote Christophe Laporte ont réussi un immense doublé derrière le Belge Remco Evenepoel.
On vous sent lessivé…
C’était vraiment dur. A la fin, il n’y avait que la tête qui essayait de fonctionner. Je n’avais plus rien dans les jambes. On était vraiment pas les favoris de la course mais on a pris nos responsabilités, comme on voulait le faire. On était très satisfaits, au fur et à mesure, de la tournure que prenaient les choses. On a fait la course parfaite et déclenché là où on voulait.
Quelle était la stratégie ?
Je suis allé voir Thomas (Voeckler, le sélectionneur des Bleus) pendant un ravitaillement pour de l’eau. Je voyais Remco essayer de mettre des petites attaques dans les montées. Du coup, j’ai compris que c’est dans les transitions que ça allait partir. Je sors sur un moment de plat avec un peu d’allant et je vois que je suis avec des bons rouleurs. L’objectif, c’était de prendre de l’avance et d’attendre le retour des grands champions, des grands leaders pour pouvoir anticiper. Une fois que j’ai vu Remco, je me suis que c’était parfait, qu’il allait utiliser tout le monde. Ensuite, il fallait juste rester dans sa roue et s’accrocher. Il montait toutes les bosses pour me faire péter. Au bout d’un moment, j’ai lâché. Ensuite, ce n’était que de la gestion pour moi.
A quel point les supporters français vous ont-ils poussé ?
C’est grâce à eux que je peux bien basculer dans les pavés de Montmartre. Je ne me suis pas retourné une seule fois avant le dernier kilomètre. Quand on voit la butte, on se dit que c’est incroyable. J’ai jamais vécu ça, même sur le Tour de France. Vraiment, j’avais mal aux oreilles jusqu’à l’arrivée pendant vingt minutes. Il y avait un bruit tellement fort, j’avais l’impression d’avoir des écouteurs.
On a vu beaucoup d’émotion à l’arrivée…
Quand tu vois ce cadre (il regarde la Tour Eiffel depuis le Trocadéro), tu te dis que ce n’est qu’une fois dans une vie. Je savais que j’étais dans la forme de ma vie au Tour de France, donc j’étais frustré de ne pas avoir eu le bon jour, la bonne échappée. Là, je me suis focalisé sur cette course olympique après un petit break à la maison.
En arrivant ici, je me suis dit qu’est-ce que je fous là ? (rires). Faire une médaille olympiqueça pète terrible. Je crois qu’on ne peut pas faire beaucoup plus beau dans une saison. J’ai du mal à y croire. Je vais regarder le replay pour vérifier que c’était bien moi qui étais là.
Dans quel état d’esprit étiez-vous ce matin ?
L’objectif c’était de partir pour la médaille. On savait qu’on n’était pas les favoris. Ce n’était pas du tout sûr que ça réussisse. Il y avait de très bons coureurs. Le plan c’était de courir juste, d’anticiper, d’essayer être en surnombre. On était tellement motivés hier soir après le résultat du BMX, mais aussi avec le VTT… On surfe sur cette vague et on avait envie ramener quelque chose pour la fédération, pour Thomas qui nous a choisis. La concurrence était rude pour la sélection, il fallait montrer un beau visage. Ils ont mis les grands moyens, on était dans de super dispositions pour performer sur ces JO.
On vous sent très proches les uns des autres…
Nous formons vraiment une bande de copains tous les 4 (avec Alaphilippe, Laporte et Vauquelin), ça fait la différence. On voulait performer ensemble. Remco était au dessus du lot, mais derrière on a couru comme on devait le faire. Obtenir deux médailles c’était inimaginable et on a réussi à le faire. On a vécu une course magnifique avec toute l’équipe.
