L’enquête devrait s’étendre au-delà des frontières françaises. Le parquet de Paris n’exclut pas la piste d’un commanditaire étranger dans l’affaire des étoiles de David taguées au pochoir mardi 31 octobre au matin, sur des façades d’immeubles du XIVe arrondissement parisien mais aussi dans d’autres endroits à Paris et en banlieue. « À ce stade, il n’est donc pas exclu que le marquage des étoiles de David bleues en région parisienne ait été réalisé à la demande expresse d’une personne demeurant à l’étranger », selon un communiqué de Laure Beccuau, procureure de la République de Paris.
Elle annonce ce mardi l’ouverture d’une instruction judiciaire à Paris dans cette affaire, « tant pour identifier les auteurs que pour analyser l’intention ayant guidé cette opération », indique le communiqué. Le parquet précise qu’il est « nécessaire de poursuivre les investigations sur le caractère antisémite de l’intention des auteurs de ces dégradations, notamment au regard du contexte géopolitique et de son retentissement en France ».
Couple de Moldaves
Un juge sera chargé d’enquêter sur la thèse du commanditaire étranger. Un couple de Moldaves avait été interpellé le 27 octobre dernier dans le Xe arrondissement, après qu’un riverain les a vus taguer une étoile bleue au pochoir. Ces derniers avaient « déclaré avoir agi sur la commande d’un tiers et contre rémunération, ce qu’attestait une conversation en russe dans leur téléphone », selon le communiqué du parquet.
Un deuxième couple a été identifié pour avoir tagué des étoiles bleues dans la nuit du 31 octobre au 1er novembre : à Paris, en Seine-Saint-Denis et dans les Hauts-de-Seine. Ces derniers étaient accompagnés d’une troisième personne chargée de photographier ces dégradations. Le couple a quitté le territoire français.
Influence russe ?
Selon les informations du Mondeces actions auraient directement été commanditées par l’homme d’affaires moldave Anatolii Prizenko et largement relayées par le réseau de propagande prorusse « Doppelgänger ». De nombreux comptes sur X ont en effet relayé des photos de ces pochoirs. Cette infrastructure de propagande, qui utilise des bots (logiciels conçus pour exécuter des tâches automatiques, par exemple publier en masse un contenu), avait fait parler d’elle en juin dernier lorsqu’elle avait créé des contrefaçons de grands médiasdont le Parisien.
À l’époque, le quai d’Orsay avait attribué l’origine de cette stratégie d’influence à la Russie, dénonçant une « nouvelle illustration de la stratégie hybride que la Russie met en œuvre pour saper les conditions d’un débat démocratique apaisé et donc porter atteinte à nos institutions démocratiques ».
Plusieurs enquêtes avaient été ouvertes (à Bobigny, Nanterre et à Paris) dans un premier temps mais l’ensemble des investigations avaient finalement été confiées lundi à la sûreté territoriale. « Il apparaît en effet qu’une même équipe a pu procéder aux différents marquages au cours d’un seul périple. Les investigations se poursuivent », communiquait lundi le ministère public.
Dimanche, sur BFMTV, le préfet de police Laurent Nuñez évoquait une « affaire atypique par rapport aux autres actes antisémites » et chiffré le nombre d’appositions de cette étoile à 250. Il a confirmé qu’une « équipe d’auteurs qui semble plutôt bien se coordonner » était dans le viseur des enquêteurs, et avait « la volonté que ces étoiles soient vues ».
L’équipe aurait visé « certains immeubles où ne vivait pas de membres de la communauté juive ». D’après lui, 257 actes antisémites ont été recensés dans l’agglomération parisienne et 90 personnes interpellées », depuis le 7 octobre, début du conflit entre le Hamas et Israël.