De l’alcool fort au cœur d’une guerre sino-française. La Chine a déclaré vendredi avoir lancé une enquête antidumping sur les eaux-de-vie de vin, comme le cognac, importées de l’Union européenne (UE), sur fond de tensions commerciales entre les deux puissances économiques.
Selon le ministère chinois du Commerce, cette initiative fait suite à une plainte déposée en novembre par l’Association chinoise des alcools, au nom du secteur chinois des eaux-de-vie de vin.
« Cette demande contenait les éléments de preuve nécessaires à l’ouverture d’une enquête antidumping en vertu » de la réglementation chinoise, a indiqué le ministère dans un communiqué publié sur son site Internet.
L’enquête lancée ce vendredi s’intéresse à des soupçons de dumping entre le 1er octobre 2022 et le 30 septembre 2023, ainsi qu’à de potentiels dommages pour le secteur en Chine entre le 1er janvier 2019 et le 30 septembre 2023. Elle doit s’achever avant le 5 janvier 2025 mais pourra être éventuellement prolongée de six mois en cas de « circonstances particulières », précise le communiqué.
« Nos pratiques commerciales sont pleinement conformes »
Le dumping est une pratique qui consiste notamment à vendre à l’étranger à des prix inférieurs à ceux pratiqués sur le marché national. En 2022, la Chine a importé plus d’eau-de-vie de vin que tout autre spiritueux, indique un rapport du cabinet Daxue Consulting, selon qui la plupart des importations venaient de France.
Parmi les eaux-de-vie de vin produites dans l’UE figurent notamment le cognac et l’armagnac, tous les deux produits sur le sol français.
« Cette enquête s’inscrit dans le cadre d’un désaccord commercial entre l’Union européenne et la Chine sur d’autres secteurs industriels, sans rapport avec notre activité », déclare le Bureau national interprofessionnel du cognac dans un communiqué transmis, où il assure que « les producteurs de Cognac coopéreront pleinement avec les autorités chinoises pour répondre à toute question qu’elles pourraient avoir ».
« Nous sommes convaincus que nos produits et nos pratiques commerciales sont pleinement conformes aux réglementations chinoises et internationales et que l’UE et la Chine trouveront un moyen constructif de résoudre tout différend bilatéral, comme cela s’est produit dans le passé sur d’autres sujets », ajoute-t-il.
« Protectionnisme pur et dur » contre « concurrence équitable »
Les relations entre Pékin et Bruxelles se sont tendues depuis l’annonce par l’Union européenne qu’elle cherchait à réduire sa dépendance commerciale avec la Chine, notamment dans le domaine des technologies.
Préoccupée par la concurrence des véhicules électriques chinois sur le marché européen et pressée par la France, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen avait annoncé en septembre l’ouverture d’une enquête sur les subventions chinoises aux voitures électriques. La Chine avait dénoncé cette enquête, la jugeant comme « du protectionnisme pur et dur » et souligné qu’elle était de nature à nuire aux relations commerciales sino-européennes.
Interrogée vendredi lors d’une conférence de presse à Bruxelles, Mme von der Leyen ne s’est pas prononcée spécifiquement sur l’enquête chinoise sur les alcools, mais a insisté sur l’importance d’avoir une concurrence « équitable » avec la Chine.
« Il faut qu’il y ait de la transparence quant au type de subventions accordées et quant aux circonstances dans lesquelles elles le sont », a poursuivi la responsable. Elle a ajouté que l’UE avait convenu avec les dirigeants chinois lors d’un sommet en décembre « d’examiner point par point toutes les plaintes » sur les difficultés rencontrées par les entreprises européennes pour accéder au marché chinois.