La police expulsera-t-elle une locataire de 97 ans, aveugle, en raison d’impayés de loyers ? La préfecture de Charente-Maritime a autorisé l’intervention mais l’avocat de la vieille dame s’insurge contre une procédure « cynique ».
Me François Drageon a appelé mardi ses confrères de toute la France, sur Facebook, à venir plaider avec lui devant le juge de l’exécution, le 27 juillet, pour obtenir la suspension de la mesure. Une vingtaine d’avocats de Nice, Montpellier ou Nancy notamment ont déjà répondu présents selon lui.
Plusieurs milliers d’euros d’arriérés
La propriétaire de la maison que la vieille dame occupe depuis des décennies à La Rochelle l’avait assignée devant la justice en 2018, réclamant son expulsion en raison de plusieurs milliers d’euros d’arriérés, contestés par la locataire. Le tribunal judiciaire de La Rochelle, en mars 2019, puis la cour d’appel de Poitiers, en novembre 2020, ont tranché le litige en faveur de la propriétaire.
Après trois ans de procédure, le 22 juin, la commission départementale de coordination des actions de prévention des expulsions locatives a émis un « avis favorable à l’octroi du concours de la force publique ». Dans la foulée, le préfet a prévenu la vieille dame que son expulsion pourrait intervenir « à compter du 16 août ». Ce courrier ajoutait qu’elle pouvait « contacter par téléphone le 115 » si elle ne trouvait pas de solution de relogement d’ici là.
Locataire depuis 60 ans
« Indispensable, la force publique ! Quel danger peut-elle bien représenter ? », vitupère Me Drageon. « C’est une réfugiée du franquisme. Elle est arrivée en France il y a quatre-vingts ans, occupe depuis soixante ans cette maison à La Rochelle et on va l’expulser sans autre solution que d’appeler le 115. C’est une condamnation à mort. »
« Elle ne paie pas (ses loyers) depuis 2017 », justifie Marie-Élise Tilly, directrice de cabinet du préfet interrogée par l’AFP. « En 2020, on constate la vulnérabilité de cette dame et on met en place un accompagnement social jusqu’à fin 2022. Deux logements lui ont été proposés, elle les a refusés. »
Selon la préfecture, le courrier envoyé début juillet « a permis de remobiliser la dame », qui a de nouveau adressé une demande de logement aux bailleurs sociaux. Une précédente, en mars, n’a pas abouti selon l’avocat en raison des « contraintes » liées à l’âge et à la santé de la nonagénaire.