Il a mis plus de deux ans à avouer son crime. Philippe, 69 ans, comparaît devant la cour d’assises de Versailles pour le meurtre de sa compagne le 22 août 2017 à Boulogne-Billancourt (Hauts-de-Seine). Il est également poursuivi pour atteinte à l’intégrité d’un cadavre pour avoir démembré la victime, et l’avoir incendié. S’il reconnaît les faits qui lui sont reprochés, l’accusé plaide la légitime défense.
La macabre découverte remonte au 31 août 2017 lorsqu’une promeneuse et sa fille tombent sur des ossements humains calcinés aux abords du chemin des Poiriers, à Vernouillet dans les Yvelines. Le petit gabarit de la victime, Anne-Marie, alors âgée de 67 ans, laisse d’abord penser qu’il s’agit de la petite Maëlys. Mais les autopsies écartent rapidement cette possibilité.
Le cadavre est tellement endommagé qu’il faudra presque deux ans aux enquêteurs pour identifier la défunte. Et c’est le meurtrier lui-même qui les met sur la piste en déclarant sa disparition, inscrivant son ADN dans le fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG). Après plusieurs versions discordantes, Philippe finit par passer aux aveux en octobre 2019.
Il l’étrangle et la découpe dans son appartement
Selon les propos de l’accusé au cours de l’information judiciaire, Anne-Marie se serait réveillée le 22 août 2017, hystérique, et lui aurait enserré le cou. C’est pour se défendre qu’il l’aurait à son tour étranglée vers midi, chutant sur le sol. Les pressions exercées sur la cage thoracique de la victime expliquent ses côtes cassées.
Après l’avoir tuée, « accidentellement » selon sa ligne de défense, celui qui est par ailleurs taxé d’être mythomane et nymphomane par un ami, aurait paniqué. Il aurait tranché la carotide d’Anne-Marie pour la laisser se vider de son sang dans la baignoire, avant d’aller acheter des produits nettoyants et des sacs de gravats au Bricorama d’Issy-les-Moulineaux vers 17h30… Avec la carte bancaire de la victime.
Dans la soirée, il découpe le corps à l’aide d’un couteau et d’une scie manuelle au niveau du coup, des épaules, du bassin et des genoux. Il enlève ses dents au marteau, et coupe aux ciseaux ses empreintes digitales afin de compliquer son identification.
Des sacs chargés dans sa voiture
Puis il charge les sacs contenant les membres découpés dans sa voiture et part en direction des Yvelines vers 23 heures. Sans connaître les lieux, il s’arrête sur un sentier isolé où s’accumulent des dépôts sauvages, régulièrement incendiés. Il jette les sacs au milieu des pneus, asperge le tout d’essence et met le feu.
La détonation le projette sur un rocher, lui brisant le fémur. Il parvient toutefois à ramper jusqu’à sa voiture et à rentrer chez lui. Vers 4 heures du matin, il appelle le Samu, expliquant être tombé seul lors d’un footing. Questionné sur ce point, il évoquera ensuite une dispute avec sa conjointe qui l’aurait poussé alors que celle-ci était déjà décédée.
Des incohérences dans ses déclarations
Pendant deux ans, Philippe continue à envoyer des messages depuis le portable de la victime pour faire croire à une disparition volontaire. Il utilise aussi sa carte bancaire. Au total, environ 25 000 euros sont sortis des comptes de la défunte. Devant les policiers, il décrit sa compagne comme bipolaire et schizophrène. Mais celle-ci n’était pas diagnostiquée.
Dépressive depuis de nombreuses années, elle était effectivement instable et colérique d’après ses proches. Notamment car elle ne supportait pas la relation que Philippe entretenait avec sa maîtresse, sans se cacher. L’enquête démontre qu’il fréquentait de nombreuses femmes ; il était inscrit sur plusieurs sites de rencontres.
La version de Philippe est mise à mal par plusieurs éléments du dossier. Si Anne-Marie l’avait étranglé la première, il aurait eu des traces sur le cou, ce qui n’était pas le cas selon le rapport médical de son hospitalisation. Le médecin légiste indique par ailleurs qu’il est impossible pour un corps de se vider de son sang dans les conditions décrites par l’accusé. Autant de zones d’ombre qui devront être éclaircies ces prochains jours. Le verdict est attendu vendredi 10 mars.