L’émotion et la colère prédominaient ce dimanche au sein de la rédaction d’Al-Jazeera. La chaîne satellitaire qatarie a accusé l’armée israélienne de « cibler » les journalistes palestiniens à Gaza, après la mort de deux reporters travaillant pour elle, tués dans une frappe attribuée à Israël.
Hamza Waël Dahdouh, le fils du chef du bureau d’Al-Jazeera dans la bande de Gaza, Waël al-Dahdouh, et Moustafa Thuraya, un vidéaste pigiste collaborant avec l’AFP, ont été tués dimanche alors qu’ils circulaient en voiture à Rafah, à la pointe sud du territoire palestinien. Un troisième journaliste qui voyageait avec eux, Hazem Rajab, a été grièvement blessé.
« Al Jazeera condamne fermement le ciblage par les forces d’occupation israéliennes de la voiture des journalistes palestiniens », a affirmé la chaîne dans un communiqué, en accusant Israël de « violer les principes de la liberté de la presse ».
C’est une « tragédie inimaginable », a déclaré du Qatar le secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken, qui a entamé une nouvelle tournée dans la région.
« Une haine meurtrière »
« Hamza était tout pour moi… », a réagi Waël al-Dahdouh auprès de la chaîne de télévision. « Alors que nous sommes pleins d’humanité, eux (Israël) sont remplis d’une haine meurtrière », a-t-il poursuivi.
« J’espère que le sang de mon fils Hamza sera le dernier à couler pour les journalistes et les habitants de la bande de Gaza », a-t-il ajouté depuis l’hôpital où il se trouvait, en pleurs, étreignant la dépouille de son fils, entouré de proches et de journalistes.
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Le chef du bureau d’Al-Jazeera dans la bande de Gaza avait déjà perdu son épouse et deux enfants dans une autre frappe israélienne au cours des premières semaines de la guerre.
Plus tard dans la journée, de nombreuses personnes se sont rassemblées pour les obsèques. « Le monde devrait voir avec deux yeux, pas avec un œil israélien, il devrait voir tout ce qui arrive au peuple palestinien (…) mais le monde ferme les yeux sur ce qui se passe dans la bande de Gaza », a déclaré Waël al-Dahdouh, qui a été vu en train d’embrasser la main de son fils tué.
En décembre, lui-même avait été blessé lors d’une frappe israélienne qui avait également tué un vidéaste d’Al Jazeera, Samer Abu Daqqa. La chaîne qatarie a perdu trois journalistes depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas le 7 octobre.
Ils s’étaient rendus sur le lieu d’un bombardement
Moustafa Thuraya, âgé d’une trentaine d’années, collaborait avec l’AFP depuis 2019. Il avait également collaboré avec les agences Reuters et AP, ainsi que pour la chaîne qatarie Al-Jazeera et l’Américaine CNN, selon ses collègues de l’AFP.
L’Agence France Presse (AFP) a sollicité une réaction auprès de l’armée israélienne, qui a réclamé les « coordonnées » précises de la frappe. Plusieurs heures après les faits, elle n’avait pas répondu à la demande de commentaire.
Les deux journalistes s’étaient rendus sur le lieu d’une frappe à Rafah, à la pointe sud de la bande de Gaza. C’est sur le chemin du retour qu’ils ont été mortellement touchés par une frappe. Des témoins ont déclaré à l’AFP que deux roquettes avaient été tirées sur la voiture : l’une a touché l’avant du véhicule et l’autre a atteint Hamza, qui était assis à côté du conducteur.
« Nous avons ensuite trouvé les parties du corps (de ceux qui se trouvaient dans la voiture). L’ambulance est arrivée et a transporté ceux qui étaient dans le véhicule », a dit à l’AFP un témoin qui n’a pas souhaité donner son nom pour des raisons de sécurité.
Au moins 77 journalistes tués depuis le 7 octobre
« Nous sommes sous le choc à l’annonce de la mort à Gaza de Moustafa Thuraya (…) de Hamza Waël Dahdouh (…) Il semble qu’une frappe israélienne a touché leur voiture (…) », a écrit sur X le secrétaire général de l’ONG Reporters sans frontières.
Le service de presse du Hamas a déclaré dans un communiqué « condamner ce crime odieux commis par l’armée d’occupation israélienne dans le but d’intimider (les journalistes, NDLR) et empêcher la couverture médiatique du conflit ».
Au 31 décembre, au moins 77 journalistes et professionnels des médias avaient été tués depuis le début le 7 octobre de la guerre Israël et le Hamas palestinien dans la bande de Gaza, selon le Comité pour la protection des journalistes. Parmi ces journalistes, 70 étaient palestiniens, quatre Israéliens et trois Libanais.