Il avait trouvé la mort à 22 ansà Villiers-le-Bel, dans un accident de moto aux abords de la cité des Bleuets, à proximité d’un contrôle de police. Plus de trois ans après le décès d’Ibrahima Bah, les trois policiers présents sur les lieux à bord d’un fourgon ayant pu jouer un rôle dans l’accident ont été placés sous le statut de témoin assisté, par le juge d’instruction de Pontoise en charge du dossier.
Ce dernier a estimé qu’il ne disposait pas à ce stade d’indices graves et concordants pour mettre en examen le conducteur du fourgon de 26 ans, son chef de bord et une collègue qui se trouvait à l’arrière du véhicule, dans le cadre de l’information judiciaire ouverte pour homicide involontaire. En l’état actuel du dossier, les policiers ne seraient ainsi pas jugés.
Le jeune homme percute un poteau
L’accident s’était produit le dimanche 6 octobre 2019 vers 17 heures. Le jeune homme s’était engagé au guidon de sa moto de cross bleue dans la rue Faidherbe, à Villiers-le-Bel. Plus loin, au carrefour du boulevard Salvador-Allende et de l’allée des Bleuets, trois véhicules de police achèvent une intervention pour un refus d’obtempérer. À l’arrivée du jeune homme casqué, qui roulait à 50 km/h selon l’expertise, un fourgon de police, se déplace sur sa droite pour quitter les lieux de l’intervention. Le jeune Sarcellois s’est engagé sur le trottoir pour éviter le fourgon. Il y parvient mais heurte violemment un poteau. Malgré un massage cardiaque des policiers, il décédera 1h30 plus tard à l’hôpital.
Un an après le drame environ 250 proches d’Ibo, son surnom, avaient défilé dans les rues de Sarcelles pour réclamer le visionnage des vidéos. Celles-ci n’auraient pas enregistré la séquence de quelques secondes montrant le déroulement des faits. Les proches suspectent le véhicule de police d’avoir volontairement barré la route à la moto qui arrivait et de ne pas lui avoir laissé la place nécessaire pour passer.
Des accusations que conteste le conseil des trois policiers, Me Louis Caillez. « Mes clients n’ont absolument pas voulu barrer la route de Monsieur Ibrahima Bah » a-t-il indiqué à l’AFP. Pour lui, les fonctionnaires de police n’ont pas fait de faute de conduite causant l’accident, que ce soit directement ou indirectement. « L’accident résulte d’une perte de contrôle individuelle de sa moto. »
« Une avancée insuffisante »
Pour les deux avocats de la famille, le sentiment est « mitigé » à la suite de la décision du juge d’instruction. « C’est une avancée dans ce dossier. L’instruction judiciaire avait pris du retard. On a le sentiment d’avoir été entendus par le juge d’instruction. Mais c’est une avancée insuffisante », réagit Me Vincent Brengarth. « Nous avons pointé des incohérences dans les déclarations des fonctionnaires de police. Elles n’ont pas été totalement prises en compte, elles auraient dû conduire à leur mise en examen, poursuit-il. Cela concerne notamment la trajectoire du fourgon qui a été déterminante dans l’accident. Pour nous, il y avait clairement de la part des policiers une volonté d’interception. »
L’objectif des conseils de la famille est désormais de convaincre le magistrat instructeur de procéder à la mise en examen des policiers pour qu’ils soient jugés. « Nous allons pour cela solliciter dans les semaines à venir une reconstitution », annonce Me Vincent Brengarth.