C’était une décision tout à la fois attendue et redoutée. L’agence de notation Standard&Poor’s (S&P) a décidé tard ce vendredi soir de maintenir la note de la dette française. La note AA de la France est maintenue. Dans son dernier bilan, S&P avait attribué une perspective négative à la notation française. Bercy, le siège du ministère de l’Économie et des Finances, redoutait une dégradation synonyme de sanction envers la politique économique du gouvernement.
Dans un tweet publié dans la foulée du verdict de l’agence de notation, Bruno Le Maire, le ministre de l’Economie a évidement salut cette décision qu’il estime être « cohérente avec les choix du gouvernement en matière de finances publiques ».
De son côté, S&P indique anticiper « une diminution de la dette publique en pourcentage du PIB à partir de 2025, quoique très progressivement », et estime que « la répercussion de la hausse des coûts d’emprunt due aux taux d’intérêt élevés sera progressive ». « Nous estimons que nos prévisions budgétaires comportent encore des risques importants qui pourraient, s’ils se réalisaient, réduire encore davantage la flexibilité budgétaire de la France », note l’agence, citant par exemple des « conditions de financement plus strictes » ou « une fragmentation politique accrue » qui compliquerait la mise en œuvre des politiques.
S&P clôt ainsi les revues d’automne des grandes agences de notation pour la France. Moody’s a maintenu sa note Aa2. Fitch, pour sa part, a maintenu son AA-après avoir dégradé la France en avril. En juin, S&P avait prévenu des « risques » sur l’exécution des objectifs budgétaires, et donc sur la capacité de réduire une dette de plus de 3000 milliards d’euros dont le remboursement annuel deviendra le premier poste de dépenses de l’État en 2027, devant l’Éducation. L’agence, avec laquelle Bercy communique régulièrement, s’inquiétait notamment que l’absence de majorité absolue au Parlement empêche le gouvernement de mener à bien ses textes économiques.
Des perspectives de croissance revues à la baisse
« Je pense que nous avons apporté des arguments solides sur la crédibilité de notre détermination à baisser la dette, à ramener les déficits sous les 3 % (NDLR : d’ici 2027) et à tenir les dépenses publiques », avait commenté le ministre de l’Économie et des Finances, Bruno Le Maire, jeudi sur France Inter. « Les dépenses publiques, nous les réduisons, les déficits nous les faisons baisser et la dette publique nous accélérons le désendettement », a-t-il insisté, promettant pour 2023 d’atteindre 4,9 % de déficit. Il avait par ailleurs noté, la semaine dernière sur franceinfoqu’une dégradation de la France aboutirait à jeter encore « des milliards d’euros par la fenêtre » pour payer des intérêts de dette encore possiblement renchéris par les marchés.
Malgré une contraction de 0,1 % de l’activité économique française au troisième trimestre, Bruno Le Maire continue de tabler sur une croissance de 1 % cette année, puis de 1,4 % en 2024. Dans un contexte d’économie européenne au ralenti, le consensus des économistes pour la croissance de la France n’est qu’à 0,8 % pour 2024, et a été rejoint mercredi par l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques), qui prévoyait encore 1,2 % en septembre.
La Commission européenne a prévenu en novembre que la France risque de ne pas être dans les lignes en 2024, et une peu glorieuse procédure de déficit excessif pourrait viser le pays en juin. Pour le premier président de la Cour des comptes, Pierre Moscovici, interrogé sur Europe 1à un niveau de 109,7 % du PIB (produit intérieur brut) prévu pour l’an prochain, la dette constitue un poids « qui paralyse l’action publique ». Il a cependant « le sentiment que le gouvernement a compris qu’il faut faire un effort supplémentaire ».