« Le crime commis ce soir-là, c’est un crime d’honneur, un crime de propriété qui signifie : si t’es pas à moi t’es à personne », a asséné Laure-Anne Boulanger, avocate générale, au terme de quatre jours de procès. S’adressant à l’accusé devant la cour d’assises de Bobigny (Seine-Saint-Denis), elle enchaîne : « Le meurtrier il est en face de moi, il s’appelle Abdoulaye G. ». Alors que celui-ci a nié de bout en bout sa responsabilité. Elle va requérir 30 ans de réclusion criminelle assortis d’une période de sûreté des deux tiers, auxquels s’ajoute une interdiction définitive du territoire français pour cet homme de nationalité sénégalaise.
A presque 50 ans, il était accusé d’avoir poignardé à mort Marie, 28 ans, son ex-compagne, le 15 novembre 2018 à Aubervilliers. Qui est-il vraiment ? Pendant les débats il a gardé son masque chirurgical et n’a offert que son plus mauvais visage. Moqueur lorsque la cour diffuse l’audition filmée de son fils de 4 ans, désinvolte voire insultant devant la cour. Il n’a jamais voulu endosser la paternité de ce meurtre atroce. Un meurtre commis dans la chambre de Marie, pendant que ses cinq enfants étaient dans le salon. La fratrie était composée d’une fillette de 8 ans, un garçon de 4 ans et de triplés de 9 mois.
« C’est papa qui a tué maman »
Il restera de ce procès du féminicide de Marie, l’image d’un petit garçon apeuré, qui mange son poing. C’est le fils de l’accusée et de la victime. La cour d’assises avait diffusé mercredi la vidéo de son audition par la police judiciaire. « C’est papa qui a tué maman », a-t-il compris du haut de ses quatre ans. Le suspect n° 1 sera rattrapé en janvier après sa fuite en Italie. Il va s’ingénier à nier les faits : « Je sais que je n’ai pas tué sa mère », déniant les témoignages des enfants. « Vous crachez au visage de ces enfants », lui lancera le ministère public.
Pourtant tout, ou presque, le désigne. Tout d’abord le récit fait par M., la fille de Marie. Cette enfant de 8 ans décrit son beau-père qui part en courant, un couteau à la main et derrière lui, sa mère ensanglantée se tenant le cou puis s’effondrant sur le palier. Un autre témoignage émane d’un ami. Abdoulaye le rencontre la nuit des faits, porte de la Chapelle et lui confier qu’il s’est disputé avec sa femme et qu’il « l’a plantée ». Me Thibaud Cotta, son avocat, démonte une à une les accusations : « On a eu la déclaration de M. (la fillette) comme étant une vérité absolue. On a considéré qu’il était le seul coupable possible. On s’est arrêté là. Il n’y a pas de certitude sur la culpabilité d’Abdoulaye. Ce doute amène la présence de quelqu’un d’autre sur les lieux », a-t-il estimé. Le verdict sera rendu lundi.